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Un Marseillais a Phnom Penh

Le 1er mars 2005,

Nous passons quelques jours a nous reposer dans la capitale avant de continuer notre voyage vers le Vietnam. La ville n’est pas desagreable en soi mais le bruit des motos ajoute a la salete de certains quartiers, le marche central en particulier, ne me laissent pas une impression inoubliable.

Nous aimons nous promener le long du quai Sisowath, non loin du palais royal. Il se situe la ou le Tonle Sap, jaune de boue, et le Mekong, beaucoup plus vert, se reunissent. En ce moment, c’est le Tonle Sap qui se jette dans le Mekong.Le quai est quasiment desert en debut d’apres-midi mais, au crepuscule, est rapidement envahi de Phnom Penhois venus admirer le Mekong, jouer au ballon ou tout simplement discuter. Une ribambelle de petits restaurants s’etendent le long du fleuve. Nous laissant guider par notre intuition, nous choisissons le Taboo Restaurant et arrivons de concert avec Alessandro et Laetitia avec qui nous avons dine la veille au bord du lac Boeng Kak. Enchantes de nous retrouver, nous dejeunons ensemble. A la fin du repas, le patron de l’etablissement vient taper la causette en francais, sans aucun accent... enfin si, marseillais ! Le bonhomme a vecu pres de trente ans en France dont vingt a Marseille ou il a ouvert un restaurant cambodgien dont il est toujours proprietaire. Il est revenu au pays, il y a maintenant dix ans, evitant ainsi les annees les plus sombres du Cambodge.

D’ailleurs, il a l’air de nier un peu la situation actuelle en ce qui concerne la pourriture du gouvernement. En insistant un peu et en creusant, il admet que seuls les plus hauts responsables sont corrompus mais "tu n’as qu’a la fermer sinon il te mettent un flingue sur la tempe ou te jettent en prison". Dans ces conditions, il trouve que la pays a beaucoup evolue depuis quelques annees et nous met au defi de trouver d’autres solutions.

Par exemple, il nous explique qu’il y a encore trois ans, beaucoup d’enfants mendiaient a Phnom Penh, particulierement sur le quai Sisowath. Maintenant, ils vendent des quotidiens ou des livres de recits et d’histoire sur le regime des Khmers rouges. Je lui retorque que faire travailler des enfants n’est pas une solution, qu’ils ont autre chose a faire a leur age, comme aller a l’ecole, s’amuser et etre plus insouciants. Il est categorique : les familles les plus pauvres n’ont pas le choix, faire des enfants est une source de revenus indispensable car ces petits travailleurs permettent la survie de la famille. Ce n’est pas du Victor Hugo ou du Hector Malot : les enfants ne sont pas exploites par cruaute ou cupidite.

En ce qui concerne la prostitution et la pedophilie dont le Cambodge est victime, son avis est bien tranche et interessant. Le fait d’en parler avec les guides touristiques permet aux personnes concernees de programmer beaucoup plus facilement leurs prochaines vacances... C’est la demande qui cree l’offre quand une population ferait n’importe quoi pour survivre et elle a commence avec l’arrivee des Casques Bleus au debut des annees quatre-vingt-dix avec la mise en place de l’Autorite provisoire des Nations Unies pour le Cambodge ou Apronuc (qui soit dit en passant a ete loin d’etre une reussite). Leur depart a ete marque par l’acceleration de l’epidemie de SIDA !

L’Apronuc aura quand meme permis l’arrivee massive d’ONG dans le pays. Notre Marseillais nous rapporte qu’il y en a aujourd’hui plus de mille et que les resultats sont mitiges car on voit ou part l’argent quand les responsables ont les plus belles maisons et les plus beaux 4x4 de Phnom Penh. Laetitia, telle un chevalier defendant une noble cause monte au creneau car elle a travaille dans une ONG avant de partir pour son tour du monde. Elle rappelle le combat et les ideaux de bien des ONG. Mais notre hote pense que c’est theorique, la pratique est tout autre, au moins au niveau des responsables.

Les Americains en prennent aussi pour leur grade. Interdisant aujourd’hui les armes de destruction massive dans de nombreux pays, ils ont pourtant pris toute l’Indochine comme terrain d’essai pour toutes les armes possibles et imaginables, ou presque. On retrouve aujourd’hui des gens mutiles ou malformes, des animaux mutants, des terres ou des forets empoisonnees a cause de mines, napalm, agents oranges et autres horreurs.

Un autre sujet qui porte a reflexion : les publicites pour cigarettes francaises. On peut voir dans tout le pays de grands panneaux ventant les merites des gauloises ou les cigarettes Alain Delon (sic). Alors que la France met en place une campagne de lutte contre le tabac, la Seita, entreprise publique (qui au passage a commence a delocaliser en Pologne sous un gouvernement de gauche), se permet de faire sa publicite a l’etranger...

Tout cela nous fait mediter. Notre patron desire changer de sujet. Il nous raconte des blagues, nous parle de musique, nous conseille un concert dans une boite de nuit. C’est vrai que nous voyons dans le Cambodge un pays ravage par la guerre civile et nous examinons les blessures une a une. Il est important de se rendre compte que malgre les plus demunis, les Cambodgiens sont tres souriants, aiment rigoler, sont tres joueurs, ecoutent beaucoup de musique, se passionnent pour les gadgets electroniques. Bref, ils veulent aller de l’avant et je leur souhaite de reussir.

Michaël

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