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Coincés en pleine mer…

Le 26 mai 2007,

Nous nous réveillons à l’aube, juste à temps pour admirer le lever du soleil. Mais, en regardant par le hublot, nous nous apercevons que le bateau ne bouge pas et qu’il est arrêté en pleine mer. Aucune côte à l’horizon, nous sommes au beau milieu de l’océan. Michaël, qui ne dort plus depuis un moment, nous explique qu’il a entendu un grand bruit cette nuit et que le bateau n’avance plus depuis. Ca ne doit pas faire loin de 4 heures maintenant. Après enquête, nous apprenons que l’hélice du rafiot s’est cassée contre une trop forte vague et que nous n’avons plus qu’à attendre qu’un autre bateau vienne nous remorquer… Il devrait arriver vers 13h ! Et nous sommes encore à au moins 6 heures de route jusqu’à Padang… Dire que nous devions arriver vers 7h du matin initialement. Nous n’y serons pas avant 20h au bas mot ! Heureusement que nous avions pris quelques jours de marge pour notre avion vers Singapour. C’est plus sage en Indonésie. Les transports ne sont vraiment pas leur point fort !

Bien, encore une fois, nous n’avons plus qu’à attendre… Michaël subit un peu le mal de mer et commence à saturer sérieusement avec l’Indonésie. Voilà quatre jours qu’il est malade et il n’en voit pas le bout ! Il a envie de rentrer chez nous à Lyon… Quant à moi, sans dire que je suis folle de joie à l’idée de rester coincée toute la journée dans cette boîte de conserve, je me dis que ça fait partie de voyage et prends mon mal en patience.

Nous discutons avec Sylvain du poste qu’il nous propose à Montréal. Il travaille dans une boîte de jeux vidéo, le rêve de Michaël. Il a vraiment l’air intéressé par notre profil et ça nous fait pas mal réfléchir… Nous n’avions pas prévu de quitter Lyon, mais bon. Si c’était le destin qui nous tendait une perche ? Michaël est plutôt partant à première vue, je reste sur la réserve. J’ai trouvé un travail qui a l’air intéressant à Lyon et je commence à me faire des amis dans cette ville. Tout lâcher pour tout recommencer ailleurs n’est pas une entreprise facile. Nous l’avons déjà fait il y a un an seulement, j’avais envie de me poser un peu… Il faut qu’on y réfléchisse.

Nous commençons à trouver le temps long dans ce rafiot de malheur…Vers midi, nous apercevons un petit bateau qui arrive à toute allure vers nous. Ouf, ça y est, il va pouvoir nous remorquer jusqu’à la côte ! Au lieu de ça, nous voyons, par notre hublot, plusieurs femmes et enfants qui débarquent de notre bateau pour aller dans le nouveau venu. Avant que nous ayons vraiment eu le temps de réaliser quoique ce soit, le petit bateau est déjà reparti avec la moitié des passagers à son bord. Nous restons pantois… Personne n’est venu nous dire ce qui se passait, qui partait sur ce bateau et pourquoi. Apparemment, les femmes et les enfants ont été désignés d’office pour partir en premier sur ce bateau. Même si je n’aurais jamais abandonné Michaël sur ce navire, j’aurais bien aimé qu’on me demande si je voulais partir, juste pour le principe !

Notre espoir se transforme en déception… Nous ne sommes plus très nombreux maintenant à être coincés ici, mais les femmes sont parties avec un gilet de sauvetage sur le dos, il n’en reste plus assez pour nous qui sommes juste abandonnés au milieu de l’océan ! Je n’aborde même pas le sujet du canot de sauvetage…Espérons qu’une tempête n’ait pas la bonne idée de se déclarer au-dessus de nos têtes ! L’inquiétude commence à monter au sein de notre petit groupe. Nous partons donc à la recherche de quelques informations sur la suite des événements. Nous avons deux sons de cloche différents. Certains membres de l’équipage nous apprennent que le petit bateau va revenir dans 4 heures (le temps de faire l’aller-retour) pour emmener le reste des passagers mais qu’il n’y aura pas de place pour nos bagages. Les sacs à dos devront rester dans le bateau et nous les récupérerons plus tard (nous avons juste un avion dans 2 jours…). L’autre version serait qu’un gros bateau est en route pour venir nous remorquer et qu’il devrait arriver vers 13h. Bref, dans tous les cas, nous n’avons plus qu’à prendre notre mal en patience.

En attendant, nous commençons à avoir faim et n’avons rien à manger avec nous : nous ne pensions pas que nous serions encore sur ce bateau à midi. Heureusement, les hommes d’équipage du bateau venu chercher les femmes et les enfants ont apporté du riz et du poisson. Le cuisinier nous prépare le repas dans sa mini cuisine et nous nous jetons dessus totalement affamés. Nous n’avons rien eu dans le ventre depuis la veille vers 18h, juste avant d’embarquer sur ce navire de malheur. Un peu de protéines nous fait du bien…

Soudain, nous apercevons au loin la silhouette d’un gros bateau. Il est plus de 13h. La seconde version serait donc la bonne ! Je suis plutôt contente de ne pas devoir abandonner mes affaires… Nous sommes invités dans la cabine de pilotage afin d’assister à la manœuvre de remorquage. Une grande corde est jetée, reliant les deux navires et nous voici tirés par le nouveau venu. Enfin, nous bougeons ! Ca fait juste dix heures que notre embarcation est tombée en panne et n’avance plus d’un mètre…

Encore une fois, la durée du parcours jusqu’à Padang diverge selon les personnes interrogées. Certaines disent quatre heures, d’autres, moins optimistes, penchent plutôt pour dix heures… Au secours ! Ca achève Michaël qui n’était pas déjà en grande forme. Le problème sur ce bateau, c’est qu’il ne peut tenir debout nulle part, les plafonds étant trop bas pour lui. Il n’y a que sur le pont qu’il peut totalement se redresser, mais le tangage du bateau le rend malade au bout de 5 minutes. Il n’en peut plus et n’arrête pas de râler du coup. Heureusement que Sylvain est là pour absorber une partie du ras le bol de Michaël !

Tandis que je me perds dans un bon thriller haletant, Michaël discute du Canada avec Sylvain qui est un grand défenseur de la langue française au Québec. Le temps passe lentement malgré tout et la côte nous paraît toujours aussi inaccessible ! Nous essayons de dormir un peu, sans grand succès. Finalement, nous arrivons à destination vers 22 heures, après 28 heures passées sur ce maudit bateau. Nous accueillons la terre ferme avec un bonheur sans nom. Nous sommes sauvés ! L’Indonésienne, Cinmei, a même eu la gentillesse de nous prêter son téléphone portable lorsqu’elle a pu enfin capter un signal, afin que nous appelions un guide Minang recommandé par une connaissance française, pour qu’il puisse nous organiser un tour dans la région dès demain. Nous sommes fatigués et avons juste envie qu’on s’occupe de tout pour nous ! Ca fait du bien de temps en temps…

A peine sommes-nous sortis du ferry que nous sautons tous les cinq dans un taxi en direction d’un hôtel recommandé par Sylvain. Nous n’avons pas débarqué à Padang même mais dans un petit village appelé Pantaï Bungus, ce qui n’est pas plus mal en fin de compte. L’hôtel se situe en bord de mer sur une charmante petite plage de sable. Les bungalows sont spacieux et fonctionnels, l’endroit est vraiment agréable. Nous dînons rapidement tous ensemble, presque en silence, étant tous trop fatigués pour partir dans de grands discours. Nous ne tardons pas à aller nous coucher juste après une bonne douche plus qu’indispensable, et nous nous endormons comme des pierres.

Eve-Laure

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