Le 21 février 2005,
Nous commencons notre visite de la ville par la recherche d’un bouquiniste qui acceptera de nous racheter notre stock de romans ainsi que notre guide de la Thailande. La ville n’est pas denuee de charme, mais les plus beaux batiments qui servent de bars et de restaurants a touristes sont un peu trop tape a l’oeil par rapport au niveau de vie moyen du pays. Dans toutes les librairies que nous croisons, des livres traitant de l’histoire contemporaine du Cambodge, en particulier le genocide des Khmers rouges sont exposes. Comme nous l’avions remarque avec Jay, notre guide de Battambang, les Cambodgiens n’ont pas de tabou avec cet episode difficile de leur histoire et semblent vouloir le partager avec leurs visiteurs, meme si on peut lire dans leurs yeux une certaine amertume et tristesse.
Apres dejeuner, nous decidons d’aller nous faire masser pour nous remettre des trajets un peu penibles de ces derniers jours. Nous choisissons un centre qui emploie exclusivement des masseurs aveugles : "les mains qui voient". Ils pratiquent le shiatsu, une technique japonaise. Le resultat est un peu plus rude que le massage thailandais. Eve-Laure qui n’est pas habituellement a l’aise avec les massages, sort toute contractee et degoutee pour un bon moment.
Pour nous remettre de nos emotions, nous partons visiter un centre de formation a la gravure et a la sculpture sur pierre et sur bois, subventionne par la France : Les Artisans d’Angkor. Les candidats sont choisis dans des familles defavorisees dans les campagnes environnant Siem Reap. Ils sont selectionnes par un test sur leur capacites a devenir sculpteurs. Ils sont ensuite formes pendant seulement six mois mais avec huit heures par jour de pratique, six jours par semaine. A l’issue de cette formation, ils passent un examen puis doivent travailler pendant six autres mois pour l’ecole afin d’aider a financer la formation d’autres apprentis. Enfin, ils retournent travailler en tant que sculpteurs dans leur village.
Nous visitons les ateliers de l’ecole. La qualite du travail est impressionnante ! D’apres le guide qui nous accompagne, un ancien eleve de l’ecole, ils utilisent les techniques ancestrales d’Angkor et sculptent des reproductions de la cite medievale a partir de dessins sur papier. Cette visite nous motive d’autant plus pour celle qui aura lieu demain dans les temples mythiques !
Michaël
Les Artisans d’Angkor ont bien été penses initialement comme un projet finance par l’Union Européenne. L’Union Européenne a ensuite injecte des fonds supplémentaires pour muter l’association en société, completes par le financement d’un partenaire prive, la SCA, filiale du groupe Vinci (ce qui explique sa prise de participation dans la société). L’entreprise étant cambodgienne, il a été normalement retenu de faire bénéficier l’Etat, les cadres et les artisans d’une part significative du capital. Ainsi les artisans possèdent 20% du capital.
Depuis 2003, la société est donc entièrement autonome. Elle a mis en place une subvention annuelle pour pérenniser les différentes activités des Chantiers-Ecoles de Formation Professionnelle (CEFP), a savoir la formation de jeunes cambodgiens défavorisés, dont la plupart sont issus des villages ruraux de la région de Siem Reap, aux métiers de l’artisanat d’art. Ainsi se trouve expose le 1er volet de la vocation des Artisans d’Angkor : Assurer la pérennisation des CEFP. Dans cette même optique, les Artisans d’Angkor assurent l’insertion professionnelle de jeunes issus des formations des CEFP dans leur village d’origine, dans les ateliers ruraux construits par les Artisans d’Angkor ; ceci afin de lutter contre l’exode rural vers les grandes villes et de consolider les structures familiales en place, encore fragiles.
Aujourd’hui, Artisans d’Angkor représente plus de 1000 emplois dont 624 artisans qui bénéficient d’une garantie d’un revenu contractuel (environ le double du salaire moyen d’un artisan au Cambodge), attachée à un niveau de compétence d’une assistance sociale et médicale uniques pour le pays. De par ses activités de création, fabrication et commercialisation, les Artisans d’Angkor font vivre directement et indirectement 5000 familles aux environs de la région de Siem Reap.
Enfin, la gestion des coûts de formation, d’insertion et la politique sociale en place sont assures par la vente de ses produits. Dans une démarche de développement durable de l’artisanat d’art khmer, ces derniers doivent être de qualité supérieure et font donc l’objet d’un contrôle strictement rigoureux a l’issu duquel, si le produit est conforme, est appose le label Artisans d’Angkor. Ce label constitue le point différentiateur des autres réalisations artisanales que vous pouvez trouver au Cambodge. Il n y a donc aucun risque de vampirisme des produits des petits artisans indépendants qui se positionnent sur une gamme de produits différente. Pour preuve, les Artisans d’Angkor ont ouvert une boutique entièrement consacrée a l’artisanat local dans laquelle y sont vendus des productions de petits artisans indépendants répondant au standard de qualité du label AA. (voir site Internet : http://www.artisansdangkor.com )
Je finirais sur le volet de Phnom Srok, nom "du seul village producteur du Cambodge" mentionne. Malgré l’éloignement géographique de cette commune des principales voies de communication du Cambodge, les Artisans d’Angkor ont été une des seules sociétés a risquer des investissements significatifs dans la commune, comme en témoigne la présence de ses ateliers de production, les investissements réalisés dans la formation, le recrutement de personnel et l’aide a l’installation de l’activité. Dans une approche solidaire et équitable de la relation commerciale, la société avançait le règlement nécessaire à l’achat des matières premières indispensables à la production.