Accueil > Escapades > Sumatra - Singapour > 2ème jour dans la jungle
2ème jour dans la jungle

Le 6 mai 2007,

La nuit ne fut pas vraiment excellente, surtout pour Michaël qui s’est retrouvé à côté d’un indonésien qui a ronflé, gémi et gigoter toute la nuit… Michaël se retrouvait fréquemment avec le bras de l’individu sur le nez ! Quant à moi, j’ai dormi à côté d’un anglais et de sa petite indonésienne et elle n’a pas arrêté de bouger son drap en tous sens afin de faire de l’air à son homme. Régulièrement, je me prenais le tissu en pleine figure… Mais bon, à part ça, nous avons réussi à dormir quelques heures tout de même.

Je suis la première réveillée vers 7h30 et je sors profiter de l’ambiance de la jungle au petit matin. Les autres groupes sont déjà debout et je m’intègre à l’un d’eux. J’apprends qu’ils ont aussi été poursuivis par Mina hier et que la femelle avait réussi à agripper un sac à dos d’une touriste lui flanquant une peur bleue ! Le guide a donné à manger à la femelle afin de s’en débarrasser… Tout ce qu’il ne faut pas faire ! Elle va vraiment finir par s’en prendre aux hommes si certains d’entre eux ne lui donnent pas ce qu’elle veut ! C’est stupide faire ça…

Une bonne heure plus tard, Michaël et notre guide émergent de la tente, nous pouvons enfin avoir le petit-déjeuner, mon estomac commençait à trouver le temps long ! Un sandwich aux œufs brouillés plus tard, nous nous sentons rassasiés et prêts à crapahuter de nouveau. Sauf que notre guide n’est pas disposé à nous emmener aujourd’hui… Tous les touristes sont déjà partis et Mbra nous annonce tranquillement qu’il n’a pas envie de marcher dans la forêt et il nous propose de rester là toute la matinée, lui fumant ses joints et nous, nous baignant dans la rivière. Un peu énervés, nous lui rétorquons que nous voulons retourner dans la jungle ce matin, que c’était ce qui était prévu et que nous avons payé pour ce service !

A contrecœur, notre guide accepte de nous conduire dans la jungle, mais il tire une tête de trois kilomètres de long et ne nous adresse quasiment pas la parole. L’ambiance est tendue, ce qui me gâche un peu ma balade, même si j’apprécie toujours autant l’atmosphère de la forêt et des bruits qui nous entourent. La montée est ardue et difficile, mais ce n’est rien en comparaison de la descente ! Le sol est humide et jonché de feuilles mortes, ce qui le rend extrêmement glissant. Mes bras me font mal à force de me retenir aux lianes et mes genoux commencent à souffrir également. Ah, je l’ai voulu ce trek… Et bien, j’en bave maintenant ! Tant pis, je finis sur les fesses et me laisse glisser ainsi quand je le peux. J’entends régulièrement Michaël chuter derrière moi également. Arrivés à la rivière, nous sommes à une vingtaine de minutes du campement à pieds. Mbra nous propose d’aller chercher seul les chambres à air qui nous serviront de grosses bouées pour le rafting de tout à l’heure et que nous l’attendions là. Ravie de ne plus le voir faire la gueule, j’accepte avec joie. L nous laisse sa machette au cas où nous ferions de mauvaises rencontres, ce qui nous rassure grandement ! Il nous abandonne là, au milieu de nulle part, dans un endroit à la fois magnifique et un peu effrayant…

J’en profite pour faire trempette dans la rivière et nous nous faisons bronzer en attendant son retour. Trois quarts d’heure plus tard, nous le voyons revenir avec un de ses copains, transportant les grosses bouées sur leur dos. Mbra a l’air un peu plus détendu que tout à l’heure et réussit même à amorcer quelques débuts de sourires… C’est déjà ça ! Les chambres à air sont attachées les unes aux autres, nous n’avons plus qu’à nous asseoir dans les bouées et braver les rapides de la rivière de cette façon ! Drôle de manière de faire du rafting, mais plutôt amusant ! De plus, les sensations fortes sont bien présentes, la rivière étant déchaînée… Nous revenons jusqu’au campement de cette façon, puis le temps de déjeuner un bol de nouilles, puis de charger le reste des affaires sur les bouées, protégées dans un sac plastique (il faut compter une bonne heure à la façon indonésienne), nous voilà repartis, assis sur nos gros pneus, en direction du village.

On se laisse aller avec le courant, les paysages de jungle défilant devant nos yeux. Un gros remoud cependant surprend tout le monde par sa force et le capitaine pilotant les bouées disparaît un instant sous l’eau, aspiré par le courant. Nous nous retournons et voyons que les autres guides ont également été éjectés du navire. Seuls Michaël et moi avons tenu bon, sûrement grâce à notre place privilégiée dans le wagon des bouées. Nos guides réapparaissent enfin hors de l’eau e ils partent tous dans un éclat de rire franc et enfantin ! Nous ne pouvons pas faire autrement que de les suivre et rions de bon cœur avec eux… Ca y est, notre guide est enfin déridé ! Il nous explique ensuite que c’est l’esprit de la forêt qui le rend triste certaines fois, sans qu’il puisse expliquer pourquoi. Il nous raconte que ça fait maintenant 15 ans qu’il est guide dans la jungle et que parfois, la forêt l’oppresse… Mouais, ça ne l’empêche pas de faire des efforts devant nous quand même !

Nous arrivons au village en mois d’une heure en descendant la rivière ainsi, alors qu’il nous a fallu un journée entière de marche à travers la foret hier pour atteindre le campement ! Nous remercions nos guides, partons rechercher nos gros sacs laissés à l’hôtel, puis cherchons une chambre dans une autre guest-house afin de changer un peu. Nous reprenons une chambre basique à 3 euros qui n’a rien à voir avec notre belle suite de lune de miel, mais ça nous ira très bien pour cette nuit. Nos habits de trek sont couverts de boue et commencent sérieusement à sentir la transpiration. Nous allons nous charger de laver notre linge "à l’ancienne". Armés de notre savon, nous allons jusqu’à la rivière et frottons nos vêtements contre les pierres en les savonnant énergiquement. Nous les étendons ensuite sur de grosses pierres déjà chauffées par le soleil. Ce sera sec dans deux heures ! Plus besoin de machine à laver à présent… Ceci dit, ça doit beaucoup moins bien marcher avec l’eau du Rhône…

Lors du dîner, nous retrouvons un membre du personnel de l’auberge précédente qui passait par là. Il s’appelle Lekx Men (prononcer Lek Men) et Michaël s’amuse avec son nom en l’appelant en anglais Lake Man (homme du lac), puis le transforme en Danau Orang qui est la traduction d’"homme du lac" en indonésien. Ca le fait beaucoup rire en tous cas ! C’est un homme adorable, toujours extrêmement souriant, même quand il nous raconte qu’il a perdu son restaurant dans l’inondation et qu’il a du mal à joindre les deux bouts depuis. Il a deux jumeaux de 8 ans et une petite fille de 3 ans. Il ne sait pas comment il va pouvoir trouver l’argent qui lui permettrait d’envoyer ses fils dans une bonne école à Medan, l’école étant payante dans ce pays. Avant, il était propriétaire du restaurant et sa femme était la cuisinière. A présent, le terrain leur appartient toujours, mais ils ne possèdent pas assez d’argent pour reconstruire, les systèmes d’assurance n’ayant pas lieu ici. Ils auraient besoin de 1500 euros pour leur nouveau restaurant, ça ne paraît pas énorme pour nous, mais ça représente une fortune pour eux…

Son histoire nous touche énormément Michaël et moi… Il nous paraît tellement gentil et souriant qu’on trouve vraiment injuste ce qu’il lui arrive. Il nous demande ensuite quand comptons-nous partir de Bukit Lawang et nous lui répondons demain matin, au plus tôt. Il nous rétorque que c’est dommage car il nous aurait bien invité à déjeuner chez lui demain midi pou nous présenter sa famille. Après une rapide concertation, Michaël et moi acceptons avec joie cette marque d’amitié ; nous décalerons un peu notre départ, voilà tout ! Il nous quitte peu après, afin de rejoindre sa famille à l’autre bout du village.

Nous discutons ensuite avec des indonésiens travaillant pour notre nouvelle guest-house. L’un d’eux nous apprend qu’il a perdu une fille dans l’inondation ainsi que sa maison et son gagne-pain. Malgré leurs attitudes cool et détendues d’hommes de la jungle, ils se posent tous des questions sur leur avenir qui les empêchent de dormir la nuit… Tout le monde a été touché par cette catastrophe encore une fois. Sumatra est une île qui a beaucoup souffert et qui essaie de se relever comme elle peut, tout en gardant le sourire quoiqu’il arrive ! Je les admire beaucoup pour ça… Nous partons ensuite nous coucher et essayons de trouver le sommeil malgré les miaulements suraigus de chats se battant juste à coté du bungalow.

Eve-Laure

Site réalisé avec SPIP
Design et Contenu © 2004-2007 : Eve-Laure et Michaël