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Vers Siem Reap

Le 20 février 2005,

Ce matin, nous nous levons tot (vers 6 heures) car nous partons ne bateau vers Siem Reap sur la riviere Sangker. Nous assistons a l’aube en prenant notre petit dejeuner sur le toit de l’hotel. Un autre francais attend de partir, lui aussi : c’est un toulousain d’une cinquantaines d’annees au parle fort et a l’aspect original (cheveux en bataille, chemise dechiree et tachee)

Etant donne que nous sommes bien avances dans la saison seche, la riviere est au plus bas et on doit nous transferer par minibus vers un troncon navigable. Ce moyen de transport est bien plus confortable que le pick up que nous avons emprunte a Poipet et nous en sommes ravis. Malheureusement, au bout de quelques minutes, il s’arrete et on nous invite a nous installer dans un pick up affrete par la compagnie de bateaux et qui nous emmenera jusqu’a l’embarcadere. Outre notre deception de ne pas voyager sur des sieges confortables, nous sommes huit occidentaux et cinq autochtones. J’explique au chauffeur que je ne rechigne pas a voyager en pick up, mais pour quinze dollars, c’est un peu exagere, surtout a treize personnes ! Apres avoir tranquillement rale pendant quelques minutes, sans trop y croire, je suis agreablement surpris quand un deuxieme pick up arrive.

Nous voyagerons donc a cinq en cabine, chauffeur y compris et pour rentabiliser, le chauffeur accepte une nouvelle famille de Cambodgiens a l’arriere. Les pauvres, ils payent certes beaucoup moins cher, mais doivent soufrir car nous traversons de veritables tempetes de neige cambodgienne et sommes secoues comme des pruniers. En effet, nous empruntons des chemins de campagne a peine debroussailles et ornes de trous de plusieurs metres de profondeur. Etonnes par cette nouvelle aventure, Eve-Laure et moi nous regardons en riant. C’est digne d’un vrai rallye et notre chauffeur maitrise parfaitement la situation, freinant et accelerant toujours au bon moment, nous evitant ainsi de nous enliser dans un fosse rempli de boue. Nous faisons une petite pause pour permettre a notre voiture et notre conducteur de reprendre leur souffle. Ce dernier ouvre le capot pour permettre au moteur de refroidir mais, oh surprise, il decouvre que le ventilateur est casse et l’observe dans sa main d’un air embete. Il ne lui reste plus qu’a refroidir manuellement le moteur en versant dessus des litres d’eau provenant de la riviere toute proche. Arriverons-nous un jour jusqu’au bateau ?

Tant pis pour le ventilateur, nous repartons. Afin de doubler les camions qui peuvent nous ralentir, notre chauffeur essayer de feinter l’adversaire en prenant des voies de degagement dans un etat encore plus lamentable, parfois avec succes. Mais nous faisons encore halte : un autre pick up est enlise dans un fosse et un camion de passage le depanne a l’aide d’un puissant treuil. Au bout de quelques kilometres, same same but different : deux pick up sont enlises. Entetes, les chauffeurs s’acharnent et bientot la moitie des roues disparaissent dans la boue. Deux autres voitures nous depassent et subissent bientot le meme sort. Moins temeraire et surement plus experimente, notre chauffeur attend patiemment que la situation evolue.

Nous sortons du pick up pour nous degourdir les jambes et croisons une francaise qui se plaint de la situation, sous-entend que les Cambodgiens sont feneants et pourraient s’y mettre tous ensemble pour combler les fosses sur les chemins de campagnes. Je m’abstiens de lui proposer une pelle pour qu’elle nous montre ce qu’elle sait faire... Si elle se renseignait, elle apprendrait facilement que le ministere de l’equipement ainsi que tous les autres n’ont qu’un budget tres limite car le pays est tres pauvre et surtout tres corrompu au plus haut niveau. Par ailleurs, les cambodgiens sont tres travailleurs, surtout dans les campagnes ou ils ont deja beaucoup a faire avec le culture du riz, l’elevage et la peche. Pour finir, le remblayage des routes n’est pas une tache occasionnel mais annuelle voire plus a cause la mousson. J’te jure, des fois...

Finalement, nous passons a travers les buissons qui une fois couches sous nos roues, nous protegent de la boue, pendant que les autres chaffeurs disposent devant leur roues, des branchages coupes a la machette. Ouf ! Nous arrivons enfin a l’embarcadere ou nous sommes pousses dans un bateau en bois qui demarre sans attendre les retardataires. Au moins ca nous evitera les sarcasmes de la vieille chouette francaise...

C’est notre troisieme trajet sur l’eau en Asie, mais c’est de loin le plus depaysant ! Confortablement installes sur le toit du bateau, nous laissons un veritable spectacle se derouler sous nos yeux. La riviere est envahie de jacinthes d’eau dont les feuilles restent a la surface, ce qui donne parfois du fil a retordre a l’helice de notre observatoire. Nous traversons bon nombre de villages flottants ou des enfants se bousculent en hurlant pour nous faire de grands signes. Il est etonnant de voir plusieurs maisons herissees d’antennes de television sans qu’aucun signe de civilisation ne soit perceptible au-dela de la riviere. Il utilisent surement des groupes electrogenes.

Le plus surprenant est le spectacle des filets de peche a bascule. Attenant a une maison flottante, ils sont accroches au bout d’un longue perche en bambou alors qu’a l’autre bout un contrepoids et une poulie permettent au pecheur de remonter facilement le filet a l’aide d’une corde. Pendant cette manoeuvre, les poissons glissent le long des filets en entonnoir jusque dans un recipient ou on peut venir les recuperer. Afin d’eviter aux nombreux bateaux de voyageurs de venir abimer les filets, de veritables clotures ont ete erigees dans l’eau pour les proteger. C’est donc en zigzaguant sans cesse que nous avancons au fil de l’eau.

Au bout de quelques heures, la riviere debouche dans le lac Tonle Sap, tellement grand qu’on apercoit a peine l’autre rive. Ce lac se deverse, grace a la riviere du meme nom dans le Mekong pendant la saison seche. A l’inverse, il se remplit pendant la mousson, absorbant les eaux du Mekong en crue. La riviere Tonle Sap est ainsi la seule au monde a inverser son cours a chaque changement de saison. Le lac est donc un immense reservoir qui permet d’alimenter le Cambodge en poissons, meme pendant la saison seche et qui offre des terres tres fertiles lorsqu’il se vide ! Malheureusement, la deforestation intense du pays ne permet plus aux racines des arbres de retenir les boues pendant la mousson et le lac se comble peu a peu. A terme, cela va detruire tout un ecosysteme et le moyen de survie d’un grand nombre de Cambodgiens. Les effets se font ressentir des a present dans le delta du Mekong au Vietnam, ou des inondations tuent et gachent la vie de nombreux Vietnamiens chaque annee car le lac n’a plus la capacite d’absorber le surplus du grand fleuve durant la mousson.

Nous arrivons enfin a un port fluvial situe a quelques kilometres de Siem Reap. Apres plusieurs minutes de prospection et de negociations, nous ne trouvons que des motos pour nous conduire en ville. Nous louons une chambre propre, spacieuse et bien meublee pour six dollars dans la sympathique New Millenium Guest House. A la sortie de l’hotel un chauffeur de tuk-tuk se presente a nous et propose de nous guider a travers les temples d’Angkor pour huit dollars par jour. Comme nous avons une bonne intuition avec lui et que son prix est inferieur a tout ce que nous avons pu voir, nous acceptons mais pour dans deux jours car demain, nous souhaitons nous reposer pour attaquer la visite du bon pied !

Michaël

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